ACTUALITEDes enfants de nazis racontent leur histoire familiale pour...

Des enfants de nazis racontent leur histoire familiale pour commémorer l’Holocauste

-

Publicité

25 Jan 2019
2ac92f5e27bb7d47cae700f5be9634b90871ef66AFP / Fabrice COFFRINIUlrich Gantz dont le père a appartenu aux Einsatzgruppen participent le 17 janvier 2019 à Lausanne à une réunion organisée par la CICAD

La scène peut sembler familière à beaucoup d’entre nous: une famille se rassemble autour d’une table de cuisine après la mort d’un parent pour échanger des souvenirs de sa vie qui vient de s’achever.

Mais pour Ulrich Gantz, cette journée de 2002 qui a suivi le décès de son père restera à jamais marquée par une douleur exceptionnelle, car sur la table, deux sacs de documents révèlent que son père avait appartenu pendant la guerre aux tristement célèbres Einsatzgruppen, les commandos de la mort du régime nazi.

Il avait pourtant réclamé à plusieurs reprises que son père Helmut lui raconte son expérience pendant ces années troubles, mais il s’était toujours heurté à un mur de silence.

« Toutes les réponses que tu attendais à propos de ton père sont là »: Ulrich Gantz se souvient encore des paroles de la deuxième femme de son père quand elle lui a remis les documents qui attestent apparemment de la participation d’Helmut avec son unité à l’exécution de dizaines de milliers de personnes au Belarus au début des années 40.

Aujourd’hui septuagénaire, il ne peut dissimuler son émotion en évoquant cette journée, lors d’une rencontre dans un musée de Lausanne, en prévision de la Journée du souvenir de l’Holocauste le 27 janvier.

cf2411f149ddf23304cc8229c8daf7966635db95AFP / Fabrice COFFRINI(de G à D): Les Allemands Barbara Brix, Ulrich Gantz et les Français enfants de déportés Yvonne Cossu et Jean-Michel Gausso participent à une réunion de la CICAD, le 17 janvier 2019 à Lausanne

Face à une audience composée principalement de lycéens, Ulrich Gantz a été rejoint sur la scène par Barbara Brix, dont le père a également servi dans les Einsatzgruppen, qui avaient eu un rôle crucial dans la « Solution finale », l’extermination des juifs par les nazis.

Des enfants de résistants français tués par les nazis, comme Jean-Michel Gaussot et Yvonne Cossu, ont également participé à cette rencontre inhabituelle, organisée par l’association suisse CICAD (Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation).

– « Où est la ligne rouge? » –

Ces témoignages font partie d’un effort plus large destiné à combattre la propagande révisionniste et « certaines idéologies néfastes et nauséabondes » qui permettent à la négation de l’Holocauste de perdurer, a déclaré à l’AFP Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la CICAD.

« On a aujourd’hui à la fois des propagateurs de négationnisme, on en entend, qui (…) s’évertuent à rappeler que cette histoire n’existe pas, que les chambres à gaz sont une invention », a-t-il poursuivi. « Cela veut dire que le sujet est toujours d’actualité, qu’il y a un besoin de rappeler les faits historiques. »

Pour Ulrich Gantz, la charge émotionnelle suscitée par le récit du passé nazi de son père n’a pas été le seul obstacle qu’il a dû surmonter avant d’accepter de participer à cette rencontre.

Il a confié avoir aussi dû rompre une promesse faite à son frère de ne jamais révéler en public les accusations visant leur père. Son frère voulait même brûler les documents liant son père aux exécutions, a-t-il dit.

« C’est une question que je me pose et que, je pense, chacun ici a besoin d’affronter: quand dois-je dire non? Où est la ligne rouge? Quand dois-je dire non et de quoi ai-je besoin pour pouvoir le dire? »

Après la guerre, les procureurs ont reconnu ne pas avoir suffisamment de preuves pour condamner Helmut Gantz, selon la CICAD et son fils.

Barbara Brix a déclaré qu’elle imaginait que son père utilisait ses compétences de médecin pendant la guerre pour soigner les blessés, avant de découvrir la vérité.

« Quand j’ai finalement appris qui il était, qu’il avait fait partie des Einsatzgruppen, là, c’était un tas de questions que je me suis posées à moi-même et aussi celle que je continue à me poser: comment est-ce que j’aurais agi, moi? »

– Mêmes valeurs –

Jean-Michel Gaussot n’a jamais connu son père, interné par les nazis dans le camp de concentration de Neuengamme en 1944 où il mourut l’année suivante.

36f90d30e10d500917087182d0a7fd7956060897AFP / Fabrice COFFRINIRéunion de la CICAD, association qui combat l’antisémitisme, à Lausanne, le 17 janvier 2019

Pour cet ancien diplomate, participer à une telle rencontre était un effort moins lourd émotionnellement, car il venait raconter l’histoire d’un père héroïque, pas dévoiler un secret de famille honteux.

Il est convaincu que réunir des descendants de nazis et des enfants de leurs victimes contribue à renforcer l’importance d’un récit historique honnête.

« Entre nous, il y a une véritable coopération parce qu’il se trouve que nos deux amis allemands, enfants de persécuteurs nazis, et nous-mêmes, nous partageons les mêmes valeurs. »

Source AFP

Lahcen Hammouch
Lahcen Hammouchhttps://www.almouwatin.com/
Lahcen Hammouch est journaliste. Directeur d'Almouwatin TV et Radio. Sociologue à l'ULB. Président du Forum de la société civile africaine pour la démocratie.
Publicitéspot_img
Publicité

Dernières nouvelles

Ordre du jour du Conseil des ministres du 26 avril 2024

Abonnez-vous à notre newsletter Courriel Inscriptions Conseil des ministres Membres du gouvernement Institutions fédérales Votre adresse e-mail est uniquement...

Un nouveau nom pour un avenir durable

Comprendre et gérer le changement global est une tâche dans laquelle la Société Max Planck s'engage. Cela se...

En Norvège, on compte les « sorcières » brûlées au Moyen Âge

L’Université norvégienne des sciences et technologies a présenté les résultats d’une étude portant sur les essais de « sorciers...
- Advertisement -spot_img

Briefing pour les médias sur les élections européennes de 2024 | Nouvelles

Quand: 29 avril, de 10h00 à 11h00 Où: salle de presse Anna Politkovskaïa à Bruxelles et via Interactionle Parlement diffusion...

Un employé de l’agence belge de développement Enabel à Gaza tué lors d’un bombardement

La maison où se trouvait la famille d’Abdallah abritait environ 25 personnes, dont des résidents et des personnes déplacées...

Must read

- Advertisement -spot_img

You might also likeRELATED
Recommended to you